De 1 à 100 collaborateurs en 5 ans : mon expérience de CEO

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Par Antoine Cheul

En mars 2017, nous signions le premier CDI au sein de Shopopop. 5 ans plus tard, en janvier 2022, nous avons célébré l’arrivée de notre centième collaborateur, à Nantes. Une étape symbolique qui reflète une évolution rapide, que je souhaite aujourd’hui vous partager au travers de mon retour d’expérience, en tant que cofondateur. Quels ont été les impacts sur la culture de l’entreprise ? Sur l’évolution de la posture de l’entrepreneur ? Sur la place des managers ? Sur la communication interne ?


Les débuts, moins de 15 collaborateurs

Premiers pas avec Shopopop — Les 10-12 premiers salariés ont joué un rôle clé pour véhiculer la vision de l’entreprise au quotidien et créer de la proximité entre nous tous. Le “pourquoi” des décisions n’avait pas vraiment besoin d’être expliqué puisque ces mêmes décisions étaient prises dans un espace commun et ouvert. La communication interne était extrêmement rapide, informelle et chacun avait le même niveau d’information. Le rapport hiérarchique (ressenti) par rapport à la place des dirigeants était très faible : nous nous connaissions tous, nous nous parlions au quotidien et il était facile de réunir tout le monde pour un afterwork improvisé entre collègues.

Avancer avec flexibilité — À cette période, les profils dit “couteaux suisses”, ou réellement agiles, étaient rassurants et indispensables. Nous étions entourés d’une (petite) équipe de personnes avec une forte capacité d’apprentissage et d’adaptation. Par exemple, l’activité de Shopopop nécessite d’avoir un service client disponible 6j/7 et ce tout au long de la journée. Pendant les premières années, tous les collaborateurs participaient, même les équipes techniques, à priori plutôt éloignées des métiers de la relation client. Montrer l’exemple en tant que fondateur a aussi permis de développer ce niveau de flexibilité, compensé par une écoute très attentive des équipes. Heureusement, l’équipe dédiée au service client s’est peu à peu professionnalisée, et il n’y a aujourd’hui plus besoin de changer de métier.

La première photo de l'équipe Shopopop

La période 25–50 collaborateurs

À mesure que l’entreprise grandit, les équipes se construisent : chacun se spécialise un peu plus chaque jour et le management intermédiaire commence alors à prendre de l’importance, pour soutenir la croissance de Shopopop.

Premiers départs — Ça n’a pas toujours été une période facile car des personnes ont vu leurs projets professionnels changer, ou ne plus être alignés avec les ambitions/compétences attendues par l’entreprise. Les compétences valorisées n’étaient plus nécessairement les mêmes qu’à nos débuts. Certains collaborateurs ont accompagné cette évolution en changeant de posture pour prendre un rôle de manager, d’autres ont continué d’évoluer, de se spécialiser et sont montés en compétences métiers. Et (malheureusement) certains ne se retrouvaient plus dans la nouvelle structure et ont donc choisi de prendre un autre chemin professionnel. Nous sommes passés de profils multi tâches à des profils plus spécialisés et plus experts. Les premiers salariés ont donc choisi leur voie en fonction de leurs appétences, mais choisir c’est aussi renoncer. L’abandon de certaines tâches au profit d’une nouvelle recrue peut donc être un sujet de vigilance, dans la transmission des missions et dans l’engagement. C’est à ce moment-là qu’il y a eu une transition avec les managers.

Mise en place d’un management intermédiaire — Cette étape a apporté beaucoup de changement au sein des différentes équipes : je deviens manager, un collègue devient mon manager (et inversement), je participe au recrutement de mon manager… Ces évolutions peuvent être assez déstabilisantes pour certains salariés, ce n’est pas un exercice facile, surtout quand l’affect s’en mêle. Il faut donc anticiper les réactions et faire preuve de pédagogie. Quand Shopopop s’apparentait plus à un projet qu’à une organisation, il était facile pour tout le monde de participer, de donner son avis sur une nouvelle fonctionnalité ou une campagne de communication. Mais le passage à 20 salariés nous implique d’avancer à une échelle plus globale et de trouver un nouvel équilibre : d’un côté, prendre en compte l’avis de tout le monde peut ralentir les projets, et de l’autre, se sentir moins sollicité ou écouté peut créer de la frustration pour certains. La mise en place d’instances plus ou moins strictes commence alors à prendre forme. Le pôle Technique instaure par exemple des “démos”, un temps d’échange et de présentation avec le reste des équipes, autour de leur travail et de leurs sprints.

Vers plus de communication interne — En filigrane de ces changements d’échelle, la communication interne commence à prendre plus de place, à demander plus d’organisation et d’anticipation (prévenir en avance, réserver un lieu, etc) même s’il est encore aisé de rassembler tout le monde à l’occasion d’événements informels. À cette période, en tant que fondateur, il nous était toujours relativement facile de connaître les équipes et les aspirations de chaque collaborateur, chacun savait globalement qui faisait quoi dans l’organisation.

Posture de l’entrepreneur — La mise en place d’un management intermédiaire implique les mêmes changements pour les cofondateurs que pour le reste de l’équipe : savoir déléguer et abandonner certaines missions, même celles que l’on faisait avec plaisir. Il faut aussi trouver le bon équilibre entre la liberté que l’on laisse et les nouvelles orientations que l’on donne. Choisir des managers qui n’hésitent pas à nous guider, à nous parler, est essentiel pour apprendre et grandir. Les temps d’échanges informels sont aussi très importants, car c’est dans ces moments-là que les valeurs et la vision s’alignent. Ces moments (que je valorise beaucoup) peuvent prendre la forme d’un déjeuner organisé, mais sans ordre du jour, d’un trajet un peu long, d’une conversation en fin de journée…

Photo de groupe de l'équipe Shopopop

Le cap des 50–100 collaborateurs

A ce stade, le rôle des managers devient essentiel pour transmettre les valeurs défendues par les fondateurs à leurs propres équipes.

Structuration par équipe — Les discussions entre deux portes ou dans les couloirs ne fonctionnent plus comme avant et les emplois du temps sont chargés entre les points hebdomadaires, le suivi des personnes et des projets. Nous mettons alors en place un comité de coordination (ou CoDir) et les managers deviennent de véritables relais dans l’organisation. Les équipes sont désormais plus autonomes dans les différents temps de travail mis en place : que ce soit lors des sprints, des réunions ou des suivis individuels. Mais aussi sur les temps plus informels, comme les déjeuners ou les afterwork (qui s’organisent aussi sans les patrons) ;)

La distance entre les fondateurs et les nouvelles recrues commence à se creuser peu à peu. Sur certains sujets, des personnes vont peut-être moins oser s’exprimer ou rester dans la nuance face à un problème. Là, il faut donc savoir lire entre les lignes et s’appuyer sur les managers. Pour les fondateurs, cette évolution permet aussi d’avoir une posture plus importante, un mot (à l’oral comme à l’écrit) peut résonner plus fort, ce qui est valable pour les félicitations comme pour les moments où il faut (re)mobiliser une personne.

Do you speak english ? — En parallèle, nous ouvrons nos premiers bureaux à l’étranger (Italie, Portugal, BeNeLux, Espagne). Désormais, la langue que nous privilégions pour les communications internes est l’anglais, et la maîtrise de cette langue devient un critère de recrutement supplémentaire pour la plupart des postes. Une entreprise qui se développe à l’international, c‘est aussi une chance pour ceux qui le souhaitent de se mêler à d’autres cultures, langues, façons de faire… et ainsi de continuer à apprendre et grandir. Nous avons donc mis en place des cours d’anglais en petits groupes, pour les volontaires qui ressentent le besoin de se perfectionner. C’était une condition indispensable pour que l’entreprise grandisse sereinement à l’échelle européenne.

Création d’un pôle RH — De leur côté, les managers deviennent une équipe transverse avec des problématiques et des sujets communs comme la gestion des équipes, des compétences et… le recrutement. À nos débuts, nous passions tous beaucoup de temps à réaliser des entretiens, accueillir de nouveaux collaborateurs, et chacun appréciait donner de son temps sur ce type de missions. Mais lorsque l’on recrute plusieurs personnes par mois, voire par semaine, il devient nécessaire de structurer ces processus pour qu’ils restent efficaces, sans prendre trop de place dans l’emploi du temps des équipes.

Le passage à 50 salariés marque alors une nouvelle étape dans la gestion de nos ressources humaines. Créer une équipe dédiée est essentiel pour la gestion des contrats de travail, des paies, des congés, des absences, des notes de frais, des tickets restaurants… Le recrutement, la vie au bureau et l’onboarding deviennent donc des sujets prédominants.

Vision globale partagée — La gestion des projets n’a elle aussi cessé d’évoluer, pour que la vision de l’entreprise soit comprise et partagée par les équipes. Aujourd’hui, les projets et les améliorations produits demandent un peu plus de temps : il y a des process en place, des experts sur différents thèmes, des challenges pour bien paralléliser les projets… De sorte à trouver le bon équilibre entre qualité et vélocité. Dans une entreprise en perpétuelle construction, les idées ne manquent pas et il faut savoir dire “non” à certaines d’entre elles — parfois excellentes — car elles ne sont pas prioritaires. Cela implique d’avoir des moments clés et des outils dédiés pour accueillir les idées, au bon moment et au bon endroit.

L'équipe Shopopop en 2022

Ces 5 années m’ont permis de comprendre que le chemin que nous empruntons en tant qu’entrepreneur fait partie du voyage. Chaque étape permet de mieux préparer la suivante, malgré le temps qui passe (vite) : il faut parfois savoir ralentir pour avancer sereinement. Une entreprise, c’est aussi une aventure collective. Aller à la rencontre d’autres organisations (au même stade d’évolution que la nôtre ou légèrement en avance) nous a permis de mieux appréhender certains outils et trouver des clés de croissance.


En résumé, les points clés à retenir

  • Prendre le temps d’avancer

Profiter de chaque étape de l’aventure entrepreneuriale pour avancer sereinement, sans précipitation.

  • Communiquer avec ses collaborateurs

Adopter les bons outils et process pour mobiliser ses collaborateurs autour des projets clés, des valeurs et de la vision globale de l’entreprise.

  • Trouver sa place en tant que dirigeant

Donner entière confiance aux équipes et ne pas utiliser sa posture de dirigeant pour impacter la roadmap des projets et des différentes équipes.

  • Se construire un réseau professionnel

Aller à la rencontre de ses pairs pour poser ses questions, découvrir d’autres façons de travailler et avoir toutes les cartes en main pour établir sa stratégie.

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Par Antoine Cheul

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